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Brachyurus calvus de l’Amérique du Sud a le visage entier d’une nuance écarlate brillante, mais cette coloration n’apparaît pas avant la maturité du mâle[1].

La couleur de la peau nue du visage diffère étonnamment suivant les espèces. Elle est souvent brune ou de couleur chair, avec des taches parfaitement blanches ; mais, souvent aussi, noire comme la peau du nègre le plus foncé. Chez le Brachyurus, le visage est d’un écarlate plus brillant que la joue de la plus rougissante Caucasienne ; ou plus jaune parfois que chez aucun Mongolien, et dans plusieurs espèces il est bleu, passant au violet ou au gris. Dans toutes les espèces que connaît M. Bartlett, espèces chez lesquelles les adultes des deux sexes ont le visage fortement coloré, les teintes sont ternes ou font défaut pendant la première jeunesse. On observe le même fait chez le Mandrill et chez le Rhésus, chez lesquels le visage et la partie postérieure du corps ne sont vivement colorés que chez un seul sexe. Dans ces derniers cas, nous avons toute raison de croire que ces colorations sont dues à l’action de la sélection sexuelle ; or, nous sommes naturellement conduits à étendre la même explication aux espèces précédentes, bien que les deux sexes, lorsqu’ils sont adultes, aient le visage coloré de la même manière.

Les singes sont loin d’être beaux, mais quelques espèces se font remarquer par leur élégant aspect et leurs brillantes couleurs. Le Semnopithecus nemæus, quoique très-singulièrement coloré, est, dit-on, fort joli ; son visage teinté d’orange est entouré de longs favoris d’une blancheur lustrée, avec une ligne rouge marron sur les sourcils ; le pelage du dos est d’un gris délicat ; une tache carrée d’un blanc pur marque les reins, la queue et l’avant-bras ; un collier marron surmonte la poitrine ; les cuisses sont noires et les jambes rouge-marron. Je citerai encore deux autres singes remarquables par leur beauté, et je les choisis parce qu’ils offrent de légères différences sexuelles de couleur, ce qui permet de supposer que les deux sexes doivent à la sélection sexuelle leur élégance. C’est d’abord le Cercopithecus cephus, au pelage pommelé, verdâtre, avec la gorge blanche ; l’extrémité de la queue, chez le mâle, est marron ; mais le visage est la partie la plus ornée : peau gris bleuâtre, ombrée de noir sous les yeux ; lèvre supérieure d’un bleu délicat, et bordée à la partie inférieure d’une mince moustache noire ; favoris orangés, noirs à la partie supérieure et s’étendant en bande jusqu’aux oreilles, et celles-ci revêtues de poils blanchâtres. J’ai

  1. Bates, The Naturalist on the Amazons, vol. II, 1863, p. 310.