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soixante[1]. Le même sujet présentait encore « un abducteur spécial de l’os métatarsal du cinquième doigt, semblable à celui dont le professeur Huxley et M. Flower ont constaté l’existence uniforme chez les singes supérieurs et inférieurs. » Je me contenterai de citer deux autres exemples ; le muscle acromio-basilaire existe chez tous les mammifères placés au-dessous de l’homme et semble en corrélation avec la démarche du quadrupède[2] ; or, on le rencontre à peu près chez un homme sur soixante. M. Bradley[3] a trouvé, dans les extrémités inférieures un abducteur ossis metatarsi quinti, chez les deux pieds de l’homme ; on n’avait pas, jusqu’à présent, signalé ce muscle chez l’homme bien qu’il existe toujours chez les singes anthropomorphes. Les mains et les bras de l’homme constituent des conformations éminemment caractéristiques ; mais les muscles de ces organes sont extrêmement sujets à varier, et cela de façon à ressembler aux muscles correspondants des animaux inférieurs[4]. Ces ressemblances sont parfaites ou imparfaites et, dans ce dernier cas, manifestement de nature transitoire. Certaines variations sont plus fréquentes chez l’homme, d’autres chez la femme, sans que nous puissions en assigner la raison. M. Wood, après avoir décrit de nombreux cas, fait l’importante remarque que voici : « Les déviations notables du type ordinaire des conformations musculaires suivent des directions qui indiquent quelque facteur inconnu mais fort important pour la connaissance substantielle de l’anatomie scientifique générale[5]. »

On peut admettre comme extrêmement probable que ce facteur inconnu est le retour à un ancien état d’existence[6]. Il est tout à

  1. Professeur Macalister, Proc. Roy. Irish Academy, vol. x, 1868, p. 124.
  2. M. Champneys, Journal of Anat. and Phys., nov. 1871, p. 178.
  3. Journal of Anat. and Phys., mai 1872, p. 421.
  4. Le professeur Macalister (id., p. 421), ayant relevé ses observations en tableaux, a trouvé que les anomalies musculaires sont plus fréquentes dans l’avant-bras, puis dans la face, troisièmement, dans le pied, etc.
  5. Le rév. docteur Haughton, dans l’exposé d’un cas remarquable de variation dans le muscle long fléchisseur du pouce humain (Proc. Roy. Irish Academy, 1864, p. 715), ajoute ce qui suit : « Ce remarquable exemple prouve que l’homme possède parfois un arrangement des tendons du pouce et des doigts qui est caractéristique du macaque ; mais je ne saurais prononcer s’il convient de regarder ce cas comme celui d’un macaque s’avançant vers l’homme, ou de l’homme s’abaissant vers le macaque, ou comme un caprice congénital de la nature. » Il est satisfaisant d’entendre un anatomiste aussi distingué, et un adversaire aussi acharné de l’évolution, admettre même la possibilité de l’une ou de l’autre de ces deux premières propositions. Le professeur Macalister a aussi décrit des variations dans le long fléchisseur du pouce, remarquables par leurs rapports avec le même muscle chez les quadrumanes (Proc. Roy. Irish Academy, vol. x, 1864, p. 138).
  6. Depuis la première édition de cet ouvrage, M. Wood a publié un autre mémoire, Philos. Trans., 1870, p. 83, sur les variations des muscles du cou, de