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RESTES FOSSILES.

téressé. À la hauteur de 83 pieds j’ai trouvé, enfouis au milieu des coquillages et des débris entraînés par la mer, quelques bouts de fil de coton, des morceaux de roseau tissés et un épi de maïs. J’ai comparé ces restes avec des objets analogues trouvés dans les huacas ou vieilles tombes péruviennes ; ces objets sont identiques. Sur la terre ferme, en face de San Lorenzo, auprès de Bellavista, il y a une plaine fort étendue et fort plate ayant environ une altitude de 100 pieds ; la partie inférieure de cette plaine est formée de couches successives de sables et d’argiles impures mélangés à un peu de gravier ; la surface, jusqu’à une profondeur de 3 à 6 pieds, consiste en un terreau rougeâtre contenant quelques coquillages marins et de nombreux petits fragments de poterie rouge fort grossière plus abondants en certains endroits que dans d’autres. J’étais d’abord disposé à croire que cette couche superficielle, en raison de sa grande étendue et de sa parfaite égalité, avait dû se déposer sous la mer ; mais je me suis aperçu ensuite qu’elle reposait sur un plancher artificiel de cailloux roulés. Il semble donc fort probable qu’à une période où le sol se trouvait à un niveau inférieur, il existait une plaine très-semblable à celle qui entoure aujourd’hui Callao ; cette dernière, protégée par un banc de cailloux, n’est que fort peu élevée au-dessus du niveau de la mer. Je pense que les Indiens fabriquaient leurs poteries dans cette plaine et que, pendant quelque violent tremblement de terre, la mer franchit le banc de cailloux et transforma la plaine en un lac temporaire, ainsi qu’il est arrivé autour de Callao en 1713 et en 1746. L’eau aurait alors déposé la boue qu’elle portait en suspension et déposé aussi les fragments de poteries enlevés aux fours, plus abondants en certains endroits que dans d’autres, et des coquillages marins. Cette couche, contenant des poteries fossiles, se trouve à peu près à la même altitude que les coquillages sur la terrasse inférieure de l’île San Lorenzo, couche de coquillages dans laquelle j’ai trouvé enfouis des fils de coton et quelques autres objets. Nous pouvons donc en conclure, sans crainte de nous tromper, que, depuis l’apparition de l’homme en Amérique, il s’est produit un soulèvement de plus de 83 pieds, car il faut tenir compte de l’affaissement qui s’est produit depuis que les vieilles cartes ont été dressées. Bien que, pendant les deux cent vingt années qui ont précédé notre visite, le soulèvement à Valparaiso n’ait certainement pas dépassé 19 pieds, il n’en est pas moins vrai qu’à partir de 1817 il s’est produit un soulèvement de 10 ou 11 pieds, en partie de façon insensible, en partie pendant le tremblement