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AMBLYRHYNCHUS TERRESTRE.

mouvements étaient gracieux et rapides ; quelquefois il s’aidait de ses pattes sur le fond de l’étang. Dès qu’il arrivait près du bord, et pendant qu’il était encore dans l’eau, il essayait de se cacher sous les touffes de plantes marines ou en entrant dans quelque crevasse. Dès qu’il pensait que le danger était passé, il sortait de son trou pour venir s’étendre au soleil en se secouant aussi fort qu’il le pouvait. Je saisis plusieurs fois ce même lézard en le pourchassant jusqu’à un endroit où il aurait pu entrer dans l’eau, mais rien ne pouvait le décider à le faire ; aussi souvent que je rejetai, il revint de la façon que je viens d’expliquer. On peut peut-être expliquer cette stupidité apparente par ce fait que ce reptile n’a aucun ennemi à redouter sur la côte, alors que, quand il est en mer, il doit souvent devenir la proie des nombreux requins qui fréquentent ces parages. Aussi y a-t-il probablement chez lui un instinct fixe et héréditaire qui le pousse à regarder la côte comme un lieu de sûreté et à s’y réfugier dans quelque circonstance que ce soit.

Pendant notre séjour, en octobre, je vis extrêmement peu de petits individus de cette espèce ; tous avaient au moins un an. Il est donc probable que la saison de reproduction n’avait pas encore commencé. Je demandai à plusieurs personnes si on pouvait me dire où ce lézard dépose ses œufs, on me répondit invariablement qu’on ne savait seulement pas comment il se propage, bien que chacun connût parfaitement les œufs de l’espèce terrestre ; c’est là un fait extraordinaire quand on pense combien ce lézard est commun.

Examinons actuellement l’espèce terrestre (Amblyrhynchus Demarlii) ; cette espèce a la queue ronde et ses pieds ne sont pas palmés. Au lieu de se trouver comme l’espèce aquatique sur toutes les îles, cette espèce n’habite que les parties centrales de l’archipel, c’est-à-dire les îles Albemarle, James, Barrington et Indefatigable. Dans les îles Charles, Hood et Chatham situées plus au sud et dans les îles Towers, Bindloes et Abingdon situées plus au nord, je n’en ai jamais vu ni entendu parler. On dirait réellement que cet animal a été créé au centre de l’archipel et qu’il ne s’est propagé de là que jusqu’à une certaine distance. On trouve quelques-uns de ces lézards dans les parties élevées et humides des îles, mais ils sont beaucoup plus nombreux dans les régions basses et stériles auprès de la côte. Je ne peux donner une meilleure idée de leur nombre considérable qu’en disant que, lors de notre séjour à l’île James, nous eûmes la plus grande peine à trouver, pour y