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L’ÉMANCIPATION DE LA FEMME

d’atteindre ce but dans les 10 000 communes avec une seule école où la loi se voit obligée d’adjoindre aux maîtres des directrices d’ouvroirs.

Les considérations précédentes deviennent bien plus importantes encore si on les applique à l’instruction secondaire ; des richesses énormes sont affectées dans les bourgs, les petites villes, des colléges communaux, à des écoles professionnelles qui ont un nombre insuffisant et quelquefois dérisoire d’élèves pendant que des jeunes filles sans aucun moyen de s’instruire contemplent ces maîtres inoccupés, ces locaux vides, ces bibliothèques, ces collections intangibles. D’un autre côté, il est reconnu que le nombre des écoles professionnelles est insuffisant pour les garçons comme pour les filles ; si nous multiplions les écoles spéciales sans mieux les utiliser que la plupart de celles qui existent, nous serons loin de réaliser l’idéal qu’il faut poursuivre sans relâche : la plus grande diffusion de l’enseignement avec le moins de frais possible.

Pour l’enseignement supérieur, les mêmes inégalités sont sensibles dans les grands centres de population. Quoi qu’on fasse, nos diverses facultés ne pourront jamais être à la portée de tous et de toutes si l’on spécialise systématiquement l’instruction. Nos cabinets de physique, nos laboratoires de chimie, nos bibliothèques, nos collections littéraires, scientifiques et artistiques sont des richesses trop précieuses et trop rares pour que nous ne les utilisions pas mieux ; les hommes éminents qui dispensent l’enseignement des facultés ne sont pas assez communs non plus pour que nous fassions de leur parole le monopole d’un sexe ; la France enfin n’a pas trop de lumière pour la tenir ainsi d’une main avare sous le boisseau. Supposons même que nous ayons assez d’argent à gaspiller pour ouvrir aux jeunes filles un nombre suffisant d’écoles secondaires et supérieures, tel jeune homme pauvre de la localité où serait située cette école serait encore privé d’instruction parce qu’il ne pourrait aller chercher au loin à grands frais l’école spéciale des garçons, et réciproquement la jeune fille pour n’avoir pu sui-