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PATRIE


Plus bas, sous les mûriers où se file la soie,
Et sous les oliviers amis d’antique paix,
Les moissons ondulaient que mûrit et que ploie
Le fort soleil, avec le vent complice et frais.

Les montagnes étaient bornes infranchissables.
Puisque je ne savais alors que mon pays,
Ses rivières, ses prés, ses forêts et ses sables ;
Et des autres n’ayant encore rien appris.

Rien ne m’influençait pour n’aimer que toi seule,
Ô France dont j’étais une chétive enfant,
Me serrant tendrement contre l’antique aïeule,
Les mains pleines des fleurs de son sol triomphant ;

Les yeux pleins du mirage ardent de sa lumière,
Variée au feuillage, aux souffles, aux saisons,
À la longueur des jours que mesure la terre,
À l’infini plongeant des vastes horizons !