Page:Daudet - Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon, 1872.djvu/73

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d’habillement, quand on apportait le café et que, toutes les chaises se rapprochant, on le faisait parler de ses chasses futures…

Alors, le coude sur la nappe, le nez dans son moka, le héros racontait d’une voix émue tous les dangers qui l’attendaient là-bas. Il disait les longs affûts sans lune, les marais pestilentiels, les rivières empoisonnées par la feuille du laurier-rose, les neiges, les soleils ardents, les scorpions, les pluies de sauterelles ; il disait aussi les mœurs des grands lions de l’Atlas, leur façon de combattre, leur vigueur phénoménale et leur férocité au temps du rut…

Puis, s’exaltant à son propre récit, il se levait de table, bondissait au milieu de la salle à manger, imitant le cri du lion, le bruit d’une carabine, pan ! pan ! le sifflement d’une balle explosive, pfft ! pfft ! gesticulait, rugissait, renversait les chaises…