LE PAPE EST MORT
ai passé mon enfance dans une grande ville de province coupée en deux par une rivière très encombrée, très remuante, où j’ai pris de bonne heure le goût des voyages et la passion de la vie sur l’eau.
Il y a surtout un coin de quai, près d’une certaine passerelle Saint-Vincent, auquel je ne pense jamais, même aujourd’hui, sans émotion.
Je revois l’écriteau cloué au bout d’une vergue : Cornet, bateaux de louage, le petit escalier qui s’enfonçait dans l’eau, tout glissant et noirci de mouillure, la flottille de petits canots fraîchement peints de couleurs vives s’alignant au bas de l’échelle, se balançant doucement bord à bord, comme allégés par les jolis noms qu’ils portaient à leur arrière en lettres blanches : l’Oiseau-Mouche, l’Hirondelle.