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VI

la bavaria


Malgré tout ce que l’on a écrit depuis quelques années sur le chauvinisme français, nos sottises patriotiques, nos vanités, nos fanfaronnades, je ne crois pas qu’il y ait en Europe un peuple plus vantard, plus glorieux, plus infatué de lui-même que le peuple de Bavière. Sa toute petite histoire, dix pages détachées de l’histoire de l’Allemagne, s’étale dans les rues de Munich, gigantesque, disproportionnée, tout en peintures et en monuments, comme un de ces livres d’étrennes qu’on donne aux enfants : peu de texte et beaucoup d’images. À Paris, nous n’avons qu’un arc de triomphe ; là-bas ils en ont dix : la porte des Victoires, le portique des Maréchaux, et je ne sais combien d’obélisques élevés à la vaillance des guerriers bavarois.

Il fait bon être grand homme dans ce pays-là ; on est sûr d’avoir son nom gravé partout dans la pierre, dans le bronze, et au