Page:Daudet - Jack, I.djvu/148

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bavard que le bruit excite, donnait à Moronval force détails sur le voyage d’Argenton, l’état désespéré de sa tante.

Enfin on partit.

Jack et sa mère s’assirent dans le fond de la victoria, Mâdou sur le siége à côté d’Augustin ; c’était peu royal, mais Sa Majesté en avait vu bien d’autres.

Le départ fut charmant, le long de cette avenue de l’Impératrice si large le matin, aérée et familiale. On rencontrait quelques promeneurs, de ceux qui aiment à respirer un peu de soleil avant le mouvement, le bruit, la poussière de la journée, des enfants accompagnés de gouvernantes, des tout petits, portés sur les bras, dans la solennité de leurs longues robes blanches, d’autres, plus grands, les bras et les jambes nus, les cheveux flottants. Des cavaliers passaient aussi, des amazones, et dans l’allée réservée, le sable ratissé fraîchement gardait les traces de ces premières cavalcades et semblait, au pied des pelouses vertes, un chemin de parc bien plus qu’un endroit public. Le même aspect tranquille, luxueux, reposé, s’étendait aux villas éparses dans la verdure et dont les briques roses, les ardoises bleuies par cette belle matinée ressortaient comme lavées de lumière fraîche.

Jack s’extasiait, embrassait sa mère, tirait Mâdou par sa tunique :

— Tu es content, Mâdou ?

— Oh ! bien content, moucié.