Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/41

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chaussée de la rue du Val-de-Grâce qui tenta le sous-préfet par le calme, l’aspect provincial de la maison et de la rue, le voisinage du Luxembourg où les enfants pourraient s’aérer. L’installation s’y fit gaiement. La joie des petits d’ouvrir les caisses, de retrouver des objets connus, leurs livres, la poupée de Fanny, l’établi de menuisier de Maurice. Après l’indifférence banale de l’hôtel, l’amusement d’un camp bohème ; tant de choses inutiles pour beaucoup d’autres qui manquaient, la bougie dans un vieux flacon à eau de Cologne, des journaux servant d’assiettes… On rit de bon cœur le premier soir ; et lorsque après un dîner léger, sur le pouce, les matelas déroulés, les caisses en tas, Lorie-Dufresne, avant de se coucher, promena solennellement la bougie sur cet intérieur de commissionnaire en marchandises, il eut un mot qui traduisait bien leur intime bien-être à tous : « C’est un peu dégarni, mais au moins nous sommes chez nous ! »

Le lendemain, ce fut plus triste. Avec les frais de voiturage, l’avance du loyer, Lorie avait vu la fin de son argent, déjà fort entamé par la note des Gailleton, les voyages, le séjour à Paris et