Page:Daudet - L'Universalité et le roman, paru dans L'Action française, 23-11-1922.djvu/4

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zac, mais sous un plan différent et nouveau.

Comme l’œuvre de Balzac, celle de Proust possède l’universalité. Je veux dire qu’elle a des fenêtres sur tous les compartiments de la connaissance, en même temps que sur toutes les circonstances de la vie. La comédie humaine de Proust, cette étonnante Recherche du Temps perdu, dont six volumes sont encore à paraître, traite, elle aussi, de l’art militaire, de l’agriculture, de la philosophie, de la politique, de la géologie, des états des corps en mouvement, de la physiologie, de la sociologie, etc… et même des microbes et des psychopathies. Mais, alors que, chez Balzac, ces digressions, splendides et profondes, sont incluses massivement dans la pâte romanesque — tels les bijoux des matrones dans les arcs de triomphe romains – chez Proust, les mêmes digressions sont refondues et moralisées. Il est vrai que, par ailleurs, la trame romanesque proprement dite, ou, si vous préférez, dramatique, est d’un grain moins serré que chez Balzac, par la constante présence et l’intervention de la personnalité de l’auteur. Mais, ceci dit, chez l’un comme chez l’autre la richesse est infinie et l’avidité mentale sans limites. On voit par eux l’immen-