Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/145

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L’heure fixée pour le départ de la diligence approchait. Il prit son chapeau, jeta son manteau sur ses épaules et sortit, après s’être assuré que les valises qui contenaient ses vêtements sacerdotaux avaient été portées au bureau des Messageries. La résidence épiscopale étant située sur le pont Sainte-Catherine, il devait, pour arriver à la diligence, traverser la place Saint-Corentin.

Comme il s’y engageait un homme surgit de l’ombre, et le salua de ces mots :

– Bonsoir, Audrein ; nous ne te reverrons plus.

Il passa sans répondre, peut-être sans comprendre. Quelques instants après, il prenait place dans la voiture où, déjà, se trouvaient quatre voyageurs : trois dans l’intérieur, un sur le siège à côté du conducteur. Elle se mit en route au moment où sonnaient neuf heures à l’horloge de la cathédrale. L’évêque se tenait dans son coin, serré dans son manteau, son chapeau sur les yeux, ne parlant pas, comme s’il eût tenu à ne pas se faire reconnaître. Bientôt, sans doute, il s’assoupit et ses compagnons comme lui.

Le voyage se poursuivit ainsi jusque vers minuit. Brusquement et comme on arrivait à la descente de Saint-Hervé, qui se trouve en avant de Châteaulin, un coup de fusil fut tiré, d’un des côtés de la route, sur le conducteur, accompagné de ces paroles prononcées par une voix d’homme :

– Halte-là ! Arrête, coquin !