Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/33

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leur concert avec les Anglais pour s’emparer de Brest. Sous les ordres d’un chouan fameux, ami et émule de Georges, nommé Mercier, dit Mercier la Vendée, quinze cents hommes portant l’uniforme des armées républicaines devaient être introduits dans la ville par M. de Rivoire, en passant par la rade. Le préfet maritime arrêté, ils auraient appelé les Anglais.

Bonaparte, indigné par cette entente des chouans avec l’Angleterre, fait emprisonner Rivoire et le traduit devant une commission prévôtale composée d’officiers de marine. Rivoire est acquitté, bien que les faits mis à sa charge soient établis. Ce dénouement inattendu accroît la fureur du premier Consul. Il casse la sentence, fait saisir les juges, les dépouille de leurs grades et renvoie l’accusé devant le conseil maritime de Rochefort. Cette fois, Rivoire est condamné à la déportation et, finalement, enfermé dans la forteresse de Lourdes, d’où il parviendra à s’évader en 1807.

La police poursuit de tous côtés les divers membres de l’agence. Pour la plupart, ils parviennent à se dérober à ses recherches. Le chevalier de Margadel se réfugie à Saint-Germain chez un sieur Le Fuel, directeur de l’enregistrement, dont la sœur passe pour sa maîtresse. L’abbé Ratel partage un moment cet asile. Puis, tandis qu’une jolie personne avec laquelle il entretient des relations intimes, Julienne Spère, dite Mme Derlang, est arrêtée et conduite au Temple avec d’autres femmes accusées comme elle de s’être employées pour l’agence, il s’enfuit de Paris. L’année suivante, on le retrouve en Angleterre s’occupant activement des intérêts royalistes et recevant du gouvernement britannique une pension annuelle de quatre cents livres sterling. L’abbé Godard déjoue aussi les efforts de la police. Il meurt d’ailleurs bientôt, tué par le chagrin d’être l’auteur involontaire de l’événement.