Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/55

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chouans à eux-mêmes. On put croire que ceux-ci renonçaient à la lutte. Bien que Georges continuât à rester introuvable, sur toute l’étendue de la Bretagne, son action parut paralysée.

Ce n’était de sa part qu’une feinte et son inertie n’était qu’apparente. À défaut d’une prise d’armes générale, que ne permettaient plus les circonstances, il voulait tenter un coup de main contre Bonaparte, l’enlever au milieu de son escorte et profiter du désarroi que causerait sa disparition pour proclamer le roi. Bonaparte supprimé, il était sûr, disait-il, d’être secondé par un grand nombre de généraux et de fonctionnaires. En vue de cette audacieuse entreprise, il avait rassemblé autour de lui une poignée d’hommes, tous anciens chouans, dont l’intrépidité lui était connue, et disposés, à son exemple, à vaincre ou à périr.

Il ne se dissimulait pas cependant les périls qui l’entouraient. Ils ne résultaient pas seulement de l’activité et des rigueurs que déployaient les troupes envoyées pour le combattre. Ils s’aggravaient encore des innombrables ruses de la police, de l’espionnage qu’elle avait organisé et des pièges qu’elle s’apprêtait à lui tendre. Incessamment, il en était averti par les chefs chouans restés à Paris, en apparence résignés à la défaite de la cause royaliste, en réalité n’attendant qu’une occasion pour recommencer à la défendre. À la faveur des relations cordiales qu’ils entretenaient avec le gouvernement consulaire et surtout avec Fouché, certains d’entre eux, le comte de Bourmont et le baron de Malartic, par exemple, étaient tenus au courant des intentions de la police et s’empressaient d’en faire part à Georges.

Dans les papiers de M. de Malartic, qui m’ont été communiqués par son petit-fils, existe une lettre sans autre signature que les initiales M. L. qui ne laisse aucun