Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/70

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cas, ce ne serait pas le seul émissaire pareil que vous auriez fait envoyer vers moi, et que j’aurais fait fusiller.

C’est sans doute à Laisné et à Duchatellier qu’il faisait allusion. Il ajouta qu’il les croyait morts. Causant avec un huissier nommé Codron, qui semble avoir été placé près de lui au Temple pour provoquer et recueillir ses confidences, il déclara qu’ils avaient été fusillés comme espions. La police, quoiqu’elle affectât de l’ignorer, savait d’ailleurs à quoi s’en tenir. Le 11 octobre 1801, Desmarets envoyait en secret un secours à la veuve de Duchatellier, accompagné de ces deux lignes : « J’ai l’honneur de saluer Mme Duchatellier au nom de l’attachement que m’avait voué et inspiré son mari. » Un peu plus tard, il lui faisait obtenir une pension de 600 francs.

La mère de l’enfant de Becdelièvre fut l’objet d’un traitement analogue. Le 6 juin 1805, elle adressait une supplique à l’Empereur pour obtenir d’être mise en possession du maigre héritage du mort, que la famille lui disputait. « Sire, vous voyez à vos pieds la veuve infortunée d’un de vos sujets morts pour le service de Votre Majesté. » Desmarets apostillait la demande en ces termes : « M. de Becdelièvre a été positivement assassiné par ordre de Georges, en remplissant dans l’Ouest une mission que le gouvernement lui avait confiée. » Quant aux parents de Laisné, il résulte d’une lettre de sa mère à Louis XVIII qu’à la date du 5 mai 1814 ils en étaient encore à croire que leur fils avait été fusillé par ordre du gouvernement impérial.

Il ne reste pas d’autres détails sur ces ténébreux épisodes. Il en existe moins encore sur une mission du même genre dont se chargèrent également, en ce mois de décembre 1800, deux anciens officiers des armées vendéennes, Bertrand Saint-Hubert, dit Saint-Ange, et de Carado-Molac, neveu de la princesse de Beauvau,