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LETTRES DE MON MOULIN.

qui font : « Coureli ! coureli ! » à midi, les cigales, puis les pâtres qui jouent du fifre, et les belles filles brunes qu’on entend rire dans les vignes… En vérité, l’endroit est mal choisi pour broyer du noir ; je devrais plutôt expédier aux dames des poèmes couleur de rose et des pleins paniers de contes galants.

Eh bien, non ! je suis encore trop près de Paris. Tous les jours, jusque dans mes pins, il m’envoie les éclaboussures de ses tristesses… À l’heure même où j’écris ces lignes, je viens d’apprendre la mort misérable du pauvre Charles Barbara ; et mon moulin en est tout en deuil. Adieu les courlis et les cigales ! Je n’ai plus le cœur à rien de gai… Voilà pourquoi, madame, au lieu du joli conte badin que je m’étais promis de vous faire, vous n’aurez encore aujourd’hui qu’une légende mélancolique.



Il était une fois un homme qui avait une cervelle d’or ; oui, madame, une cervelle