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LETTRES DE MON MOULIN.

Alors le petit avait grand’peur d’être volé ; il retournait jouer tout seul, sans rien dire, et se trimbalait lourdement d’une salle à l’autre…

À dix-huit ans seulement, ses parents lui révélèrent le don monstrueux qu’il tenait du destin ; et, comme ils l’avaient élevé et nourri jusque-là, ils lui demandèrent en retour un peu de son or. L’enfant n’hésita pas ; sur l’heure même, — comment ? par quels moyens ? la légende ne l’a pas dit, — il s’arracha du crâne un morceau d’or massif, un morceau gros comme une noix, qu’il jeta fièrement sur les genoux de sa mère… Puis tout ébloui des richesses qu’il portait dans la tête, fou de désirs, ivre de sa puissance, il quitta la maison paternelle et s’en alla par le monde en gaspillant son trésor.




Du train dont il menait sa vie, royalement, et semant l’or sans compter, on aurait dit que sa cervelle était inépuisable… Elle s’é-