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Page:Daudet - Numa Roumestan, Charpentier, 1881.djvu/43

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une demoiselle Soustelle d’Aps – avait été élevée avec elle chez les sœurs de la Calade… grande fortune…, la personne jolie, bravette, l’air un peu refréjon, mais le mariage réchaufferait tout ça. Et s’il se faisait, ce mariage, qu’est-ce qu’elle donnerait tante Portal à son Numa ? Cent mille francs en bon argent tin-tin, le jour des noces.

Sous les provincialismes du langage, il y avait là une proposition sérieuse, si sérieuse que le surlendemain Numa recevait une invitation à dîner des Le Quesnoy. Il s’y rendit, un peu ému. Le conseiller, qu’il rencontrait souvent au palais, était un des hommes qui l’impressionnaient le plus. Grand, mince, le visage hautain, d’une pâleur morbide, l’œil aigu, fouilleur, la bouche connue scellée, le vieux magistrat, originaire de Valenciennes et qui semblait lui-même fortifié, casematé par Vauban, le gênait de toute sa froideur d’homme du Nord. La haute situation qu’il devait à ses beaux ouvrages sur le droit pénal, à sa grande fortune, à l’austérité de sa vie, situation qui aurait été plus considérable encore sans l’indépendance de ses opinions et l’isolement farouche où il s’enfermait depuis la mort d’un fils de vingt ans, toutes ces circonstances passaient devant les yeux du Méridional, pendant qu’il montait, un soir de septembre 1865, le large escalier de pierre à rampe ouvragée de l’hôtel Le Quesnoy, un des plus anciens de la place Royale.


Le grand salon où on l’introduisit, la solennité des hauts plafonds que rejoignaient les portes par la peinture légère de leurs trumeaux, les tentures