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Page:Daudet - Numa Roumestan, Charpentier, 1881.djvu/67

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jeunesse, et l’enveloppant d’une pluie de baisers tendres :

« Tu as raison, cent fois raison…, c’est le contraire qu’il faut écrire… »

Il allait déchirer son brouillon, seulement il y avait là une phrase de début qui lui plaisait, et qui pouvait servir encore, en la modifiant un peu comme ceci : Vendéen du Midi, grandi dans la foi monarchique et le culte respectueux du passé, je croirais forfaire à l’honneur et à ma conscience en acceptant le poste que Votre Majesté…

Ce refus, très poli, mais très ferme, publié par les journaux légitimistes, valut à Roumestan une situation toute nouvelle, fit de son nom le synonyme de fidélité incorruptible. « Indécousable ! » disait le Charivari, dans une amusante caricature montrant la toge du grand avocat violemment disputée et tirée entre tous les partis. Quelque temps après, l’Empire s’effondrait et lorsque l’Assemblée de Bordeaux se réunit, Numa Roumestan eut à choisir entre trois départements du Midi qui l’avaient élu député, uniquement à cause de sa lettre. Ses premiers discours, d’une éloquence un peu soufflée, eurent bientôt fait de lui le chef de toutes les droites. Ce n’était que la petite monnaie du vieux Sagnier qu’on avait là ; mais, par ce temps de races moyennes, les pur-sang se font rares, et le nouveau leader triompha, aux bancs de la Chambre, aussi aisément que jadis sur les divans du père Malmus.

Conseiller général de son département, idole du Midi tout entier, rehaussé encore par la magnifique situation de son beau-père passé premier président