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VI

MINISTRE !


Trois mois ont passé depuis ce voyage au mont de Cordoue.

Le parlement vient de s’ouvrir à Versailles sous un déluge de novembre qui rejoint les bassins du parc au ciel bas, étouffé de brume, enveloppe les deux Chambres de tristesse humide et d’obscurité, mais ne refroidit pas les colères politiques. La session s’annonce terrible. Des trains de députés, de sénateurs, se croisent, se succèdent, sifflent, grondent, secouent leur fumée menaçante, animés à leur manière des haines et des intrigues qu’ils convoient sous des torrents de pluie ; et, dans cette heure de wagon, dominant le bruit des roues sur le fer, les discussions continuent avec la même âpreté, la même fureur qu’à la tribune. Le plus agité, le plus bruyant de tous, c’est Roumestan. Il a déjà prononcé deux discours depuis la rentrée. Il parle dans les commissions, dans les couloirs, à la