Page:Daudet - Port-Tarascon, 1890.djvu/110

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vous laisse à deviner quel mystérieux compagnon aux yeux étincelants menait l’œuvre de mort, fermant les cœurs à la peur, à la pitié, et, quand le coup partit, poussant le hourrah suprême…

Ah ! Le pauvre empereur, on ne retrouva pas gros de lui sous les décombres ! Quelques flocons de barbe roussie, une main de justice tordue par la flamme ; et tout de suite la Guerre démuselée hurla, le ciel fut noir de corbeaux assemblés au-dessus des frontières, la grande tuerie commença et ne finit plus.



Pendant que les peuples s’égorgeaient au moyen d’engins épouvantables, que de toutes parts sur l’horizon les villes prises d’assaut flambaient comme des torches, par les chemins encombrés de bétail en déroute, de charrettes sans conducteurs, le long des champs en friche, des fleuves rouges de sang, des vignes et des moissons impitoyablement massacrées, Jésus de son pas allègre, toujours le bâton sur l’épaule et sur ses talons le bon vieux saint qui essayait