Page:Daudet - Port-Tarascon, 1890.djvu/147

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

milieu du bruit, la voix de Tartarin se fit tout à coup entendre, sur un ton de grande dignité :

« Vous ferez ce que vous voudrez, messieurs, quant à moi je reste. J’ai ma mission de Gouverneur, il faut que je la remplisse. »

Scrapouchinat hurlait :

« Gouverneur de quoi ? Puisqu’il n’y a rien ? »

Et les autres :

« Le capitaine a raison… puisqu’il n’y a rien… »

Mais Tartarin :

« Le duc de Mons a ma parole, messieurs.

— C’est un filou, votre duc de Mons, dit Bézuquet, je m’en suis toujours douté, même avant d’en avoir la preuve.

— Où est-elle cette preuve ?

— Pas dans ma poche, toujours ! » Et d’un geste pudique le pharmacien serrait autour de son corps le manteau de grand de première classe qui abritait sa nudité tatouée. « Ce qu’il y a de sûr, c’est que Bompard agonisant m’a dit, au moment de quitter la Farandole : « Méfiez-vous du Belge, c’est un blagueur… » S’il avait pu parler, m’en