Page:Daudet - Sapho, 1884.djvu/152

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la chair étincelante qui venait de jaillir au soleil. Elle n’eut le temps de crier ni de se défendre, peut-être même pas le sentiment juste de ce qui venait de se passer.

— Ah ! je suis fou… je suis fou…

Il se sauvait, déjà loin dans la garrigue dont les pierres roulaient sinistrement sous ses pieds.

À déjeuner, ce jour-là, Jean annonça qu’il partirait le soir même, rappelé par un ordre du ministre.

— Partir, déjà !… tu avais dit… tu ne fais que d’arriver…

Et des cris, des supplications. Mais il ne pouvait plus rester avec eux, puisque entre toutes ces tendresses intervenait l’influence agitante et corruptrice de Sapho. D’ailleurs, ne leur avait-il pas fait le plus grand sacrifice en renonçant à la vie à deux ? La rupture complète s’achèverait un peu plus tard ; et il reviendrait alors aimer sans honte, ni gêne, embrasser tous ces braves gens.

Il était nuit, la maison couchée, éteinte, quand Césaire revint de conduire son neveu au train d’Avignon. L’avoine donnée au cheval, après avoir scruté le ciel, – ce regard