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Page:Daudet - Sapho, 1884.djvu/327

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Elle vint prendre le paquet de maryland à sa place habituelle, roula une cigarette et s’en allait, mais il la retint.

— Tu ne dors donc pas ?

— Non… assieds-toi là… et causons.

Elle resta au bord du lit, un peu surprise de cette gravité.

— Fanny… Nous allons partir.

Elle crut d’abord qu’il plaisantait pour l’éprouver. Mais les détails très précis qu’il donnait la détrompèrent vite. Il y avait un poste vacant, celui d’Arica ; il le demanderait. C’était l’affaire d’une quinzaine de jours, le temps de préparer les malles…

— Et ton mariage ?

— Plus un mot là-dessus… Ce que j’ai fait est irréparable… Je vois bien que c’est fini, je ne pourrai plus me séparer de toi.

— Pauvre bébé ! fit-elle avec une douceur triste, un peu méprisante.

Puis, après avoir tiré deux ou trois bouffées :

— C’est loin, ce pays que tu dis ?

— Arica ?… très loin, au Pérou…

Et tout bas :

— Flamant ne pourra pas te rejoindre…

Elle resta songeuse et mystérieuse dans son