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Page:Daudet - Théâtre, Lemerre, 1889.djvu/88

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eustache

Il ne faut pas pleurer, diable ! il faut chanter… Voyons ! voyons ! ce Retour des lilas…

suzette

Non, jamais devant toi…

eustache

Jamais devant moi ? Devant qui, alors ? Devant Léonard ? Pourquoi me dédier des romances, si tu les chantes à tout le monde et pas à moi !

suzette

Tu étais si loin quand j’ai fait mes Lilas, je n’oserais plus maintenant.

eustache

Eh bien ! Suzon, puisque tu oses quand je ne suis pas là, figure-toi que je n’y suis plus, ne regarde pas de mon côté ; suppose-moi très loin, en voyage, absent, et chante comme si j’étais à Aix, ou sinon, prends garde, j’y retourne, tu chanteras bien alors. (Suzette pousse un soupir et commence la ritournelle après avoir toussé.) (Eustache, entre ses dents :) Qui se serait douté de cela, pourtant ?

suzette, se retournant.

Hein ?

eustache

Rien ! ta ritournelle est charmante… Continue…

suzette, d’une voix tremblante.
Il m’a promis de revenir,

Quand les lilas auraient des fleurs nouvelles…

Mon Dieu ! Fi les lilas n’allaient pas refleurir…