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Page:Daudet - Trente ans de Paris, Flammarion, 1889.djvu/284

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envoyé. J’habite une grande campagne inondée de fleurs et de soleil ; je voulais en faire la retraite ordinaire de Raoul, mais ce doux et excellent garçon craignait toujours d’être importun. Dans ces temps derniers, je le priai de venir se soigner chez moi. Il refusa et entra à l’hôpital, prétextant qu’il serait mieux soigné. La vérité est que le pauvre enfant sentait sa fin prochaine et ne voulait pas donner à un ami le triste spectacle de sa mort… »

Voilà ce que l’existence m’a fourni. Longtemps je ne vis dans cette histoire qu’une de ces mille tristesses extérieures qui traversent nos propres tristesses. Cela s’était passé trop près de moi pour mon regard de romancier ; l’étude humaine se perdait dans mon émotion personnelle. Un jour à Champrosay, assis avec Gustave Droz sur un arbre abattu, dans la mélancolie des bois, l’automne, je lui racontais la misérable existence de Raoul, à quelques pas de la masure