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Page:Daveluy - L'esclave des Agniers, 1933.djvu/160

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sortirait, avec une plénitude plus grande, plus avertie, ou s’éteindrait, par sa violence même, le premier amour splendide de ce cœur de dix-huit ans.

Le 30 avril, au petit jour, Charlot, après des adieux écourtés à son cher Normanville, comme à Le Moyne, quittait les rives hospitalières de Montréal. Longtemps, son regard se tint fixé sur le Fort. Il se détachait en fière, quoique si simple beauté, sur toute cette forêt enveloppée de brumes matinales blanches, légères, floconneuses.

On navigua avec énergie jusqu’au soir. La température s’y prêtait. Un calme magnifique régnait partout. Pas la moindre trace d’Iroquois à travers ces beaux paysages boisés.

« C’est à croire que nos sanguinaires ennemis, dit soudain Charlot, ou bien sont demeurés dans leurs propres bois fort giboyeux, ou bien sont massés quelque part, prêts à une attaque sournoisement et habilement préparée ».

Hélas ! Charlot, deux mois plus tard allait voir se vérifier, de point en point, sa dernière superstition. Qu’il les connaissait bien, ces terribles ennemis des Français, vraiment !

Le voyage, dans sa dernière quinzaine ne s’accomplit pas sans encombre. De grands vents s’élevèrent. Il fallut souvent aborder sur des rives inconnues, dresser la tente et attendre