Page:Daveluy - Le filleul du roi Grolo, 1924.djvu/179

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Tout à coup, un bruit étrange et grandissant, des rumeurs, de nombreux pas précipités se firent entendre dans le corridor du palais. Très étonnée, la princesse se souleva… Elle se rejeta aussitôt en arrière. Deux seigneurs, dont la vieille ordonnance de son père, entraient en hâte dans la pièce. Leur bouleversement était tel qu’ils n’aperçurent pas la princesse, d’ailleurs dissimulée à moitié derrière le paravent. On parlait à voix assez haute.

« De grâce, général, disait l’un, apprenez-moi ce qui se passe ? Vous attendez le roi, n’est-ce pas ? Il accourt, dit-on, à la salle du jeu, mais pourquoi ? Pourquoi ?

— Un duel terrible vient d’avoir lieu autour d’une des tables de baccara… gronda l’ordonnance.

— Grand Dieu ! Un duel ! Malgré la défense récente du roi et la peine de mort immédiatement infligée au provocateur !… Justes cieux, qui a eu cette audace ?

— Oui, voilà ce qui me mettrait en colère, si je ne me retenais, répondit le vieil officier. Le coupable, figurez-vous, c’est un bel enfant de dix-huit ans, qui doit sûrement ignorer l’édit royal, car je le crois étranger, ici… Mais hélas, on sévira quand même, on sévira, comte, la proclamation du roi voyez-vous, est affichée partout depuis un mois… Misère de misère !… Ah ! quel duelliste admirable que ce jeune homme, comte !… Il fallait voir sa furie, sa promptitude, son adresse !… Rochelure, qui est pourtant d’une jolie force… a reçu de solides égratignures… Comte, il est d’une impétuosité de démon, vous dis-je, cet enfant… de démon !

— Ah ! ah ! c’est contre Rochelure qu’il se battait !

— Parbleu, vous ne l’aviez pas tout de suite deviné ? Dans quel pénible aventure ne le rencontre-t-on pas ce sinistre seigneur ! Et tenez, j’en mettrais ma main au feu, il a dû, lui-même, sournoisement, conduire son adversaire à cette extrémité.