Page:Daveluy - Le mariage de Josephte Précourt, paru dans Oiseau Bleu, 1939-1940.djvu/229

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cesseras d’être celui qui me sauva, en des heures terribles, de la faim, de la folie, de la mort… que sais-je ?

— Josephte, je n’aurais pas dû revenir au Canada, s’exclama Michel en se levant, très ému, lui aussi. Il se tint un instant près de la fenêtre le dos tourné.

— Je t’en prie, comprends-moi bien.

— Tu étais plus heureuse, lorsque je me tenais loin de toi, reprit le jeune homme, en venant reprendre son siège, le front soucieux, les yeux fuyants… Tu étais aimée, tu aimais peut-être ?

— Ah !… C’est là sans doute une des questions que tu veux me poser ?

— Oui.

— Il s’agit de Jules Paulet ?

— Oui.

— Si je l’eusse épousé, Michel, pour une raison que j’ignore encore, il m’eût fallu lui raconter notre navrante et belle histoire… Ce n’eût été qu’honnête de ma part.

— Comme tu es étrange, Josephte.

— La tragédie qui a encerclé mon enfance m’a façonnée de façon particulière. Qu’y puis-je ?

— Josephte, il faut oublier ces heures, ne le vois-tu pas ?

— Non !

— J’y joue un rôle que je bénis sans doute, mais tout a si bien changé maintenant. Je