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La veuve de Nicolas Godé, qui comptait une soixantaine d’années, s’avança au bras de sa fille de vingt ans, Mathurine, veuve de Jean de Saint-Père. Toutes deux étaient vêtues de couleurs sombres et levaient vers le gouverneur de pauvres yeux en détresse. Elles refusèrent de s’asseoir.

— M. de Maisonneuve, dit la veuve de Nicolas Godé, d’une voix basse, tremblante, triste infiniment, nous venons vous prier de ne faire aucun mal, à cause de nous, aux pauvres malheureux coupables d’hier. Comprennent-ils l’étendue de leur faute ? Ma fille, comme moi, avons entendu combien de fois nos bien-aimés disparus déclarer qu’il fallait coûte que coûte, en toutes occasions, montrer la plus miséricordieuse bonté envers ces âmes dévoyées… « Voyant alors un peu du Christ en nous, disait mon mari avec componction, peut-être aurons-nous chance de les convertir à notre foi… » Nous voulons même, Monsieur le Gouverneur, avec votre permission, aller leur porter quelques vivres et… et notre pardon, finit en pleurant la sublime Françoise Gadois[1]

Très ému, M. de Maisoneuve demeura un moment sans répondre. Puis il conduisit lui-même les charitables femmes jusqu’à la porte des détenus, en disant avec tristesse : « Votre

  1. Historique.