Page:Daveluy - Les holocaustes, 1935.djvu/34

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vaste fauteuil. Et là, bien enfoncé dans le siège moelleux, les yeux fixés sur l’inoubliable paysage de la cité de Champlain, il se prit à rêver. Il se revoyait enfant, courant un peu partout, autour de l’enceinte du Fort, sous la surveillance du bon matelot, Julien l’Idiot, ou tenant par la main l’interprète condescendant et aimable qu’était Olivier Le Tardif. Il redevenait ensuite jeune soldat sous M. de Montmagny. Que cela lui plaisait alors le rôle de sentinelle au Fort ! Il ne se lassait pas de contempler les merveilleux horizons que lui offrait Québec du haut de son roc énorme. Devant lui, c’était le fleuve qui chantait, tantôt avec douceur, tantôt avec colère, ou infinie mélancolie. En arrière, il entendait la rumeur mystérieuse des profondes forêts de la Nouvelle-France. Son imagination vagabondait avec délices autour de ce vert panorama d’immensité… « Comme cela me paraît peu changé, se prit-il à remarquer ! Que j’aimerais à m’enfoncer de nouveau sous ses pins au bruissement un peu dur… Non, hélas ! je ne suis pas guéri des aventures quelles qu’elles soient… Je les appelle, je les désire de tout mon être… Puis, et ses poings se serrèrent, j’ai ma revanche à prendre contre les ravisseurs de mon bien le plus cher… Lis-en-Fleur, je ne t’ai pas oubliée, va… J’aime Lise pourtant, corrigeait-il aussitôt. Elle ne vit que pour moi, elle m’a donné ce petit Pierre… aux yeux bleus qui me rappellent… Allons, allons, secouons tout cela. Vivons au jour le jour…