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sur chaque épaule, il tourne le dos à l’ennemi et il fait feu. Adversaire redoutable, évidemment. Bientôt, le fort Coligny s’élevait dans l’île et, sur le continent, la bourgade de Henryville.

En février 1556, Thévet rentrait en France, rapportant, entre autres curiosités, une herbe dont la combustion lente « calmait la faim et guérissait la coryza ». Il l’appela angoumoisine, parce qu’il venait d’Angoulême. On la nomma plus tard nicotine, quand Nicot en eut envoyé à la reine, et nous en faisons maintenant une grande consommation sous le nom de tabac. En même temps, passait l’océan le neveu de Villegagnon, capitaine général de la flotte en la France Antarctique. Par son entremise, Villegagnon réclamait trois ou quatre mille soldats « pour conquérir les Indes ». « Coligny, écrit un historien, eut alors une idée absurde et généreuse qui gâta tout : exporter au Brésil une religion qui n’avait point cours en France ».

Au lieu de soldats, l’amiral envoyait des pasteurs suisses et 300 jeunes gens et jeunes filles. Quand arriva cette mission, la France Antarctique était en ébullition. La discipline sévère établie par Villegagnon avait donné naissance à un complot où le vice-amiral faillit perdre la vie. Les pasteurs y ajoutèrent les discussions théologiques : neuf sectes se partagèrent les habitants de la colonie. Pour comble, on y transporta aussi un mode de gouvernement républicain inspiré de celui que Calvin avait implanté à Genève. Villegagnon, malgré sa bonne volonté, s’aliéna la sympathie des calvinistes et l’anarchie politique se mêla à l’anarchie religieuse. Divers groupes se détachèrent pour aller fonder des établissements ailleurs.