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LAURIER ET SON TEMPS

jusqu’à ce jeune homme, dans la discussion des causes privées. Invention des arguments, enchaînement des faits, conclusion des témoignages, élévation des pensées, puissance des raisonnements, harmonie des paroles, nouveauté et splendeur des images, conviction de l’esprit, pathétique du cœur, grâce et insinuation des exordes, force et foudre des péroraisons, beauté de la diction, majesté de la personne, dignité du geste, tout porta, en peu d’années, le jeune orateur au sommet de l’art et de la renommée. »

Lamartine ajoute que l’orateur doit être poète.

« Cicéron, dit-il, le fut de bonne heure, longtemps et toujours. Il ne fut si souverain orateur que parce qu’il était poète. La poésie est l’arsenal de l’orateur. Ouvrez Démosthène, Cicéron, Chatham, Mirabeau, Vergniaud : partout où ces orateurs sont sublimes, ils sont poètes. Ce qu’on retient à jamais de leur éloquence, ce sont des images et des passions dignes d’être chantées et perpétuées par des vers. »

Ces dernières paroles de Lamartine s’appliquent à Laurier. Il n’a jamais écrit en vers, mais il est poète par l’imagination et la tournure artistique de son esprit, qui inspirent et décorent ses plus éloquentes philippiques et les embellissent de figures, d’images et de descriptions si attrayantes.

Laurier a eu pour contemporains, toute une pléiade d’hommes de talent, d’avocats habiles, d’écrivains et d’orateurs distingués. C’était une génération féconde, une constellation d’étoiles brillantes, où deux hommes surtout ont brillé dans le domaine de l’éloquence politique : Chapleau et Mercier.