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les patriotes

Gagnon a été, dans les paroisses du sud de Montréal, l’un de ces hommes, de ces chefs populaires.

Lucien Gagnon prit part de bonne heure à l’agitation populaire. Il était à la grande assemblée de Saint-Charles, et il en revint plus ardent que jamais, et convaincu qu’il fallait pousser la résistance jusqu’à l’insurrection.

Il parcourut Saint-Valentin et les paroisses environnantes, répandit partout les sentiments qui l’animaient, et engagea la population à se préparer à la lutte.

Les chefs de l’insurrection s’enfuyant aux États-Unis après la bataille de Saint-Charles, s’arrêtèrent à la Pointe-à-la-Mule, virent Gagnon et l’engagèrent à les suivre pour éviter la vengeance des bureaucrates, et aviser aux moyens de prendre leur revanche. Arrivés à Swanton, état de Vermont, ils délibérèrent et décidèrent qu’il fallait rentrer au Canada, les armes à la main. Papineau et O’Callaghan, qu’ils avaient rencontrés, les avaient convaincus que Wolfred Nelson, le vainqueur de Saint-Denis, les attendait à Saint-Césaire, à la tête d’un corps considérable d’insurgés.

Comme les patriotes réfugiés à Swanton n’étaient pas assez nombreux pour faire une pareille incursion, Gagnon s’offrit d’aller au Canada faire une levée d’hommes. C’était une entreprise hardie, dangereuse. En traversant les lignes et en revenant à la tête d’une troupe aux États-Unis, il courait le risque d’être arrêté par les forces anglaises qui gardaient la frontière, ou par les autorités américaines, pour violation des lois de la neutralité.

Gagnon n’hésita pas pourtant ; il partit, entra de nuit sur le sol canadien, parcourut la Pointe-à-la-Mule et les paroisses environnantes, souleva les gens, et parvint à organiser une troupe de cinquante hommes déterminés comme lui.