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les patriotes

pour la conservation et la gloire de Votre Excellence et le bonheur de votre famille.

« L. Dandurand,
« Veuve Duquet.


« Montréal, 20 décembre 1838. »


Colborne fut insensible aux prières de la mère de Duquet comme il l’avait été à celles de l’épouse de Cardinal.

La pauvre mère revint, le cœur brisé, l’esprit presque troublé. Quand, à moitié étouffée par les sanglots, elle raconta à son fils ce qui s’était passé, il lui dit :

« Je savais bien, ma mère, que c’était peine perdue ; je ne me suis jamais fait illusion depuis que je suis ici ; après demain je serai dans un monde meilleur. Mon sacrifice est fait ; soumettons-nous, ma mère, à la volonté de la providence. »

Ce fut la dernière fois que Mme  Duquet vit son fils ; ses parents et ses amis l’empêchèrent de retourner le voir, afin d’épargner à l’infortuné jeune homme les angoisses d’une dernière entrevue, les tortures des derniers adieux.

Duquet se révolta d’abord contre la pensée de la mort ; il repoussa le spectre hideux de l’échafaud. Il n’avait que vingt ans ! Il avait à peine commencé à vivre ! À vingt ans, à l’âge où la vie semble un jardin de fleurs, où l’âme est imprégnée des parfums de l’amour, de la gloire, des sentiments les plus purs, on ne meurt pas sans regret. Lui si bon, si généreux, il ne pouvait croire qu’on le ferait mourir sur l’échafaud pour avoir trop aimé son pays !

Il comprit bientôt que ni son âge, ni ses convictions, ni l’amour de sa mère ne le sauveraient.

Sa pauvre mère ! ses chères petites sœurs ! Il ne pensait qu’à elles, ne s’occupait que d’elles. Leur