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les patriotes

Brien. Brien avait pris part au soulèvement de Beauharnois, mais il n’avait pas l’âme des Cardinal, des Duquet et des de Lorimier. C’était un homme à l’esprit distingué mais au cœur froid. Pour échapper à l’échafaud, il fit des révélations importantes qui compromirent les chefs patriotes plus que les témoignages qui furent rendus contre eux. De Lorimier ne sachant pas ce qui s’était passé, incapable d’ailleurs de croire à la trahison d’un ami, était sensible aux marques d’affection que Brien lui avait données, et lorsqu’après sa condamnation il apprit que Brien avait demandé qu’on le mît dans une autre cellule, il attribua à la sensibilité, ce qui n’était que le résultat du remords. Il lui écrivit donc à son ancien compagnon de cellule la touchante lettre qui suit :


« Montréal, Prison-Neuve, 15 février 1839,
6 heures a. m.
« Mon cher Brien,

« Il faut que je vous quitte ; le glas de la mort m’appelle sur l’échafaud. Le sort en est jeté ; il faut que je meure. Gardez la mémoire d’un ami fidèle. Je vous souhaite, si on vous épargne, de vivre longtemps et d’être heureux. Vous avez été mon compagnon dans les cachots ; nous avons habité la même cellule, nous avons longtemps partagé le même lit. Vous avez toujours été empressé à me donner des consolations dont j’avais tant besoin. Je vous en remercie ; le Ciel vous récompensera de votre charité chrétienne.

« Avant de mourir, je prie Dieu de vous accorder une vie longue et heureuse. Vous direz à mes amis comment je suis mort, vous leur direz que l’échafaud qui me fit perdre la vie ne m’enleva pas mon courage.

« Adieu, cher ami, adieu.

« Chevalier de Lorimier. »