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les patriotes

paysans, comme il les appelait ; il y avait quatre ou cinq heures que la bataille durait, ses troupes étaient décimées, ses munitions s’épuisaient, et cependant le feu des patriotes était toujours aussi vif, aussi sûr. Voulant en finir, il donna ordre au brave capitaine Markman de tourner la position des patriotes. C’était important ; si l’attaque eût réussi, les patriotes se seraient trouvés cernés. Mais, pour exécuter ce mouvement, il fallait passer à la portée des fusils des Canadiens retranchés dans les maisons voisines.

Par trois fois, Markman et ses hommes s’élancèrent au pas de course, par trois fois ils furent obligés de reculer ; ils tombaient drus comme mouches.

Ils allaient réussir, dans une dernière tentative désespérée, lorsque le brave capitaine tomba, blessé sérieusement, à bas de son cheval ; ses hommes le relevèrent et retraitèrent, l’emportant dans leurs bras. Ils avaient à peine rejoint leurs camarades derrière la grange et les piles de bois, qu’ils étaient attaqués avec fureur par de nouveaux combattants.

C’étaient les patriotes de Saint-Antoine, de Saint-Ours et de Contrecœur qui arrivaient, au nombre de cent environ, au secours de leurs frères de Saint-Denis. Ils avaient traversé de Saint-Antoine à Saint-Denis en chantant. Les troupes les ayant aperçus, tirèrent sur eux avec fureur. Le passeur Roberge conduisait la principale embarcation, un bac, où s’étaient massés une vingtaine de patriotes. Un boulet de canon emporta un morceau de son bac et brisa l’aviron qu’il avait à la main. Roberge ne bougea pas : « Couchez-vous, » dit-il aux patriotes ; et, debout, impassible, il continua à ramer comme si de rien n’était.

Encouragés par l’arrivée de ce renfort, les patriotes redoublèrent d’ardeur, et ceux qui n’avaient pas de fusils se jetèrent comme une trombe sur les habits rouges. Attaquées de tous côtés, épuisées par la faim,