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les patriotes

tomber dans le village. Pendant que les patriotes se retranchaient dans le presbytère, le couvent, l’église et quelques-unes des maisons avoisinantes, leur général, le vantard Girod, s’enfuyait, à course de cheval, du côté de Saint-Benoît.

À ce moment, il ne restait plus, pour lutter contre les deux mille soldats de Colborne, que cinq ou six cents hommes, dont la moitié à peu près avaient de bons fusils ; les autres étaient armés de bâtons, de faulx ou de pieux. Sur deux cent cinquante hommes enfermés dans l’église avec Chénier, soixante à quatre-vingts seulement avaient des fusils.

— Qu’allons-nous faire ici, dirent quelques-uns de ces braves à Chénier, nous n’avons pas d’armes ?

— Soyez tranquilles, leur répondit-il gravement, il y en aura de tués, vous prendrez leurs fusils.

Paroles héroïques qui méritent d’être conservées !

Chénier avait le calme énergique des martyrs ou des héros en face de la mort. Il commandait, et il y avait dans son regard, dans sa voix, dans ses gestes, une telle détermination, qu’on lui obéissait machinalement.

Pendant que les boulets de Colborne ébranlaient les murs des édifices où les patriotes étaient renfermés, la cavalerie et l’infanterie cernaient le village et s’emparaient de toutes les issues. À la vue de ce cercle de fer et d’acier qui se resserrait sur eux, Chénier et ses hommes virent bien que tout était perdu ; un bon nombre se hâtèrent de s’enfuir, mais les plus braves ne songèrent plus qu’à vendre chèrement leur vie.

Ceux qui étaient dans la maison de M. Scott forcèrent un détachement d’artillerie de retraiter. Ce fut la seule fois pendant la canonnade que les troupes anglaises s’exposèrent aux balles des insurgés. Enfin, le signal de l’assaut fut donné et on fit feu de tous côtés en s’avançant sur les édifices occupés par les patriotes. Ceux-ci répondirent vigoureusement pendant