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les patriotes

tous mes amis, les deux jeunes MM. Masson, M. Dumouchel père, et ses deux fils étaient en prison, j’ai tout de suite changé de détermination, et j’ai pensé que ce serait de ma part une espèce de lâcheté de les abandonner dans une circonstance aussi pénible où je pouvais leur être utile. Je résolus donc d’aller les rejoindre et de partager leur sort, quel qu’il fût. »

Ce fait démontre combien les hommes de 37 avaient l’âme grande, les sentiments élevés.

M. Girouard écrivit au colonel Simpson, qui commandait au Côteau-du-Lac, qu’il était prêt à se livrer entre ses mains et à partir pour la prison, s’il promettait d’empêcher qu’il fût maltraité sur la route comme tant d’autres patriotes l’avaient été. Le colonel Simpson, heureux de mettre la main sur un pareil homme, qui lui faisait gagner si facilement les deux mille piastres offertes pour son arrestation, promit tout, et conduisit lui-même, le même jour, M. Girouard à la prison de Montréal.

L’arrestation de M. Girouard fit beaucoup de bruit. Les journaux torys jubilèrent, et les patriotes le reçurent en prison avec attendrissement. On lui donna une cellule privée, et on ne lui permit pas de communiquer avec les autres prisonniers. Il fut cependant mieux traité que les autres ; il était mieux couché, avait plus d’air et d’espace ; sa nourriture, grâce à ses ressources personnelles et au dévouement de ses amis, fut toujours convenable. Il passait son temps à lire, à dessiner, à faire des calculs, à résoudre des problèmes scientifiques et surtout à dessiner au crayon les portraits de ses amis et de ses compagnons de prison.

Il envoyait ces portraits aux familles des pauvres prisonniers. Quel plaisir, quelle émotion quand on recevait le portrait d’un fils, d’un époux et d’un frère qu’on n’était pas sûr de revoir !