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passé, et les conjura de ne pas se laisser convaincre par personne. Cependant, MM. Nelson et Bouchette, croyant que c’était le seul moyen d’en finir, et se flattant que ce document serait suivi d’une proclamation d’amnistie générale, sauf peut-être quelques mois d’exil volontaire pour les signataires, ils s’efforcèrent de prouver qu’avec des modifications, ce document serait fort acceptable. Lorsque M. Girouard vit que leur opinion était partagée par MM. Masson, Marchesseault, Viger et quelques autres, il s’appliqua alors à faire biffer de la déclaration ce qu’il y avait de plus compromettant, « mais elle resta toujours, écrivait M. Girouard, le lendemain, encadrée des deux expressions suivantes : « Nous nous sommes révoltés » et « Nous plaidons coupables. » »

Ce fut grâce à ces mots, inoffensifs en apparence, malgré toutes les explications et atténuations du reste de la lettre, que lord Durham envoyait aux Bermudes, quelques jours après, les signataires du document. Ils comprirent alors la sagesse des conseils de M. Girouard ; mais c’étaient des hommes de cœur ; ils se dirent que le mal n’était pas aussi grand que M. Girouard l’avait prévu, puisque la lettre qui les faisait exiler faisait sortir de prison tous les autres prisonniers.

En effet, l’amnistie fut proclamée, et M. Girouard reprit le chemin de Saint-Benoît.

Il avait eu d’abord l’intention d’aller s’établir au loin ; mais les témoignages de respect et de sympathie qu’il reçut de toutes les parties du comté des Deux-Montagnes le décidèrent à rester au milieu de ses parents et de ses amis. Il se remit avec ardeur au travail ; ses succès étendirent sa renommée comme notaire, et refirent sa fortune épuisée. On s’adressait à lui de partout pour avoir son opinion dans des cas difficiles, on l’envoyait chercher pour régler les successions les plus embrouillées. Tout entier à sa profession, à sa