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œuvre épique et dotait son pays d’une littérature. En 1859 ; parut Mireille, poème en douze chants, admirable idylle tragique, tableau pastoral composé par un survivant des Grecs des Cyclades, par un héritier de Théocrite. Sept ans après, Mistral donna Calendal, poème des aventures d’un pêcheur de Cassis, qui accomplit de merveilleux travaux pour conquérir sa fiancée Estérelle, errante comme une fée dans les montagnes arides où son malheur l’a exilée. Dans Mireille, le poète avait immortalisé l’image de la Provençale ; il consacra, dans Calendal, celle du Provençal, type d’une race harmonieuse et forte. En 1884, il publia Nerte, chronique du temps des Papes, légende fantastique du moyen âge, touchante histoire d’une jeune fille vendue au démon par son père ; en 1890, la Reine Jeanne, tragédie qui constitue, avec le Pain du Péché et le Pâtre de Théodore Aubanel, tout le théâtre provençal, et, en 1897, un dernier ouvrage poétique, le Poème du Rhône, résurrection éblouissante du temps de la batellerie fluviale, qui est la plus ingénument épique des œuvres de Mistral.

La publication des Iles d’Or[1] se place en 1875. À la fin de la préface, Mistral en explique le titre : « Ce titre, j’en conviens, peut sembler ambitieux ; mais on me pardonnera lorsqu’on saura que c’est le nom de ce petit groupe d’ilots arides et rocheux que le soleil dore sous la plage d’Hyères. Et puis, à dire vrai, les moments célestes dans lesquels l’amour, l’enthousiasme ou la douleur nous font poètes, ne sont-ils pas les oasis, les Iles d’or de l’existence ? » Ce recueil de poésies lyriques contient des chansons, des poèmes, des sirventes, des élégies, des contes, des sonnets, des chants nuptiaux, des saluts, des toasts et des cantiques. Au regard de deux écrivains de son pays, Alphonse Daudet et Paul Arène, c’est le plus bel ouvrage de Mistral. « C’est, a dit excellemment M. Paul Mariélon, la plus haute expression d’un idéal et d’une race… Aucune œuvre de cet ordre ne s’était rencontrée depuis les anciens… Mieux que Mireille, qui n’est que d’ordre humain et plus accessible à la foule, mieux que Calendal, dont le haut symbolisme et le

  1. Dans cette notice et dans le choix des pièces publiées, nous n’avons envisagé en Mistral que le seul poète lyrique. On trouvera dans les ouvrages de référence auxquels nous renvoyons le lecteur d’abondants détails sur Mistral poète épique, philologue, folk-loriste, conteur, félibre, décentralisateur, etc…