maître, à me guider et à me dire de quels rôles vous me croyez plus susceptible ; car on ne peut pas être universel. J’ai, sans me flatter, les grâces des amoureuses, l’ingénuité des Agnès ; je puis prendre à mon gré l’air malin des soubrettes, et je n’aurai pas de peine à en développer toute la malice. Je sais jouer la sévérité des duègnes et des mères ; je monterais, s’il le fallait, à la dignité des coquettes ; j’en aurais les manières folâtres ; en un mot, je suis assez Protée pour prendre toutes sortes de formes ; il s’agit de savoir celle qui me convient le mieux, et c’est à vous, cher maître, que j’ai recours. Vous avez des lumières, vous me connaissez depuis longtemps : décidez-moi, afin que je me fixe ; arrachez-vous un peu aux grandeurs qui vous environnent[1]. Hélas ! il fut un temps où vous m’auriez sacrifié tout cela ! mais ne rappelons point des jours trop heureux… Vos conseils, cher maître, ne me les refusez pas.
« Je suis etc. »
M. Poinsinet n’est pas resté en arrière, et l’on distribue aussi sa réponse à mademoiselle Le Clerc. Elle est curieuse par un examen assez juste des talens de nos principales actrices de la Comédie Française.
« Je vous loue, ma belle voisine[2], de votre façon de penser philosophique. Certainement, après un grand poète, une actrice illustre est ce qui fait le plus d’honneur à l’humanité. J’aime à voir fermenter chez vous l’amour de la gloire. Vous êtes faite pour l’acquérir. Puissent nos noms entrelacés passer à la postérité comme ceux