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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 2 - 1766-1769 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/315

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AOÛT 1768

tisans très-chauds ; elle est dans un genre qui peut plaire aux étrangers.

— On vient de remettre sous les yeux du public la querelle de deux philosophes, dont ils auraient dû pour leur gloire ne pas rendre le public témoin et juge. C’est un assez plat auteur qui, dans une brochure[1] fort insipide, récapitule ce procès célèbre. Il est question du différend de M. Hume avec J.-J. Rousseau. L’anonyme prétend que le Genevois n’est que malade, et non pas méchant ; que l’Anglais, au contraire, est malade et méchant tout à la fois. On ne croit pas que M. Rousseau adopte un pareil défenseur, plus propre a infirmer sa cause qu’a la soutenir. Par occasion, ce scribler fait une excursion sur M. de Voltaire, et, au lieu d’adresser a ce grand homme les reproches qu’il peut mériter justement, il ressasse de vieilles calomnies répétées cent fois et cent fois réfutées. La rage d’écrire peut seule avoir fait prendre la plume a ce méchant écrivain, et son insipide production ne fait pas plus d’honneur a son cœur qu’a son esprit.

— Le Discours de Paoli à ses compatriotes est répandu ici et fait la plus grande sensation. Les âmes les plus viles sont toujours réchauffées aux discours d’un vrai patriote. Malgré les bruits répandus des intelligences de ce général avec la France, on ne peut croire que sa vertu républicaine se soit laissé corrompre par les promesses d’un monarque. Le caractère de Paoli paraît trop indépendant pour ne pas préférer la liberté aux plus magnifigues récompenses. D’ailleurs, tous les traits qu’on

  1. Il s’agit probablement du Plaidoyer pour et contre J.-J. Rousseau et le docteur D. Hume, l’historien anglais, etc. (par Bergerat). Londres et Lyon, Cellier, 1768, in-12. — R.