Page:De Banville - Odes Funambulesques.djvu/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
10
PRÉFACE.

sommes fils de l’Amour, mille preuves l’attestent[1]. »

J’entre dans un théâtre de genre à l’instant précis où la salle croule sous les bravos. En effet, le rideau s’est levé sur un décor aussi hideux qu’un véritable salon bourgeois. Aux fenêtres, de vrais rideaux en damas laine et soie, attachés avec de vraies torsades de passementerie à de vraies patères en cuivre estampé. Sur la cheminée, une vraie pendule de Richond. Puis de vrais meubles et une vraie lampe avec un vrai abat-jour rose en papier gaufré. Voici un vrai comédien qui met ses vraies mains dans ses vraies poches ; il fume un vrai cigare ; il dit : qu’est-ce que t’as ? comme un vrai commis de nouveautés ; les applaudissements roulent comme un tonnerre, et la foule ne se sent pas d’aise. ― « Avez-vous vu ? Il fume un vrai cigare ! Il a une vraie culotte ; regardez comme il prend bien son chapeau ! Il a dit : j’aime Adèle, tout à fait comme M. Édouard que nous connaissons, lorsqu’il allait épouser Adèle ! » Tu as raison, bon public. Tout cela est réel comme le

  1. Parabase des Oiseaux, traduction de M. Artaud.