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ODES FVNAMBVLESQUES.

 
Moi-même un instant je le fus.
J’ai comme un souvenir confus
D’avoir embrassé la Chimère.
J’ai mangé du sucre candi
Dans les feuilletons du lundi :
Ma bouche en est encore amère.

Quittons nos lyres, Érato !
On n’entend plus que le râteau
De la roulette et de la banque ;
Viens devant ce peuple qui bout
Jouer du violon debout
Sur l’échelle du saltimbanque !

Car, si jamais ses yeux vermeils
Ne sont las de voir les soleils
Sans baisser leurs fauves paupières,
Le poëte n’est pas toujours
En train de réjouir les ours
Et de civiliser les pierres.