Page:De Callières - De la manière de négocier avec les souverains, Amsterdam, 1716.djvu/56

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qu’on leur donne, & mettent tout à profit ; ce n’eſt pas qu’il ne faille des qualitez excellentes pour former un bon General, mais comme il y a quantité de dégrez dans les armées, celui qui n’a pas aſſez d’intelligence pour parvenir aux premiers, demeure en chemin & devient un bon ſubalterne, qui ne laiſſe pas de ſeèrvir utilement dans ſa ſphere.

Il n’en eſt pas de même d’un Negociateur, s’il n’eſt habile dans ſon métier, il gâte ſouvent toutes les affaires qu’on lui confie, & il fait des préjudices irreparables à ſon maître ou à l’Etat qui l’employe.

Il faut non ſeulement qu’un Negociateur ne ſoit pas ſujet à ſes humeurs, ni à ſes fantaiſies ; mais qu’il ſache s’accommoder a celles d’autrui, qu’il ſoit comme le Protée de la fable, toûjours prêt à prendre toutes ſortes de figures ſelon l’occaſion & le beſoin ; qu’il ſoit guai & agreable avec les jeunes Princes qui aiment la joye & les plaiſirs, qu’il ſoit ſe-