Page:De Claustre - Dictionnaire portatif de mythologie - Tome 1.djvu/44

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
24
ADO ADO

l’on avoit ôté à l’Amour ſes fléches & ſon carquois. Venus, charmée de la beauté de cet enfant, le mit dans un coffre, & ne le montra qu’à Proſerpine. Celle-ci proteſta qu’elle vouloit le garder. Jupiter fut pris pour arbitre entre les deux Déeſſes, & prononça qu’Adonis ſeroit libre pendant les quatre premiers mois de l’année, qu’il donneroit les quatre ſuivans à Proſerpine, & les quatre derniers à Venus. Adonis renonça aux quatre mois que Jupiter lui avoit donnés, pour les ſacrifier à Venus. D’autres ont dit que Jupiter, dans l’appréhenſion de mécontenter les deux Déeſſes, remit la déciſion à Calliope, qui ordonna qu’Adonis ſeroit ſix mois à Venus, & ſix mois à Proſerpine. Une querelle de cette importance fut un an à ſe décider, pendant lequel Proſerpine avoit eu la proviſion ; & pour faire avoir à Venus les ſix mois qui lui avoient été adjugés, il fallut députer vers Pluton les Heurs, qui ramenèrent Adonis ſur la terre. Ce fut pour ſe venger de ce jugement, qui privoit Venus de la préſence de ſon amant pendant l’année, que cette Déeſſe inſpira aux Dames de Thrace un amour ſi violent pour Orphée, fils de Calliope, que chacune voulant l’arracher aux autres, elles le mirent en piéces. Venus, dans les Dialogues de Lucien, ſe plaint de l’Amour ſon fils, de ce qu’il l’envoie tantôt ſur le Mont Ida pour Anchiſe, tantôt ſur le Mont Liban pour Adonis, dont il lui avoit enlevé la moitié, par le ſoin qu’il avoit pris de le faire aimer de Proſerpine.

D’autres Auteurs ont dit que Venus l’enleva, & s’attacha ſi fort à lui, que le ſéjour du ciel même lui paroiſſoit un ſéjour peu agréable, en comparaiſon des bois, des montagnes & des rochers où elle ſuivoit Adonis à la chaſſe. Cet enlévement étoit, pour les anciens Peintres, un ſujet auſſi fréquent de leurs tableaux, que celui de Ganymède ; c’eſt Plaute, dans ſes Ménechmes, qui nous apprend cette anecdote.

Les deux Déeſſes, dont on vient de parler, ne furent pas ſeules épriſes des charmes d’Adonis. Il y en a qui ont prétendu qu’il avoit les deux ſexes ; que, comme homme, il faiſoit les délices de Venus, & comme femme ceux d’Apollon. D’autres, ſans lui donner les deux ſexes, ont dit qu’il étoit le favori de Venus & de Bacchus ; on a même ajouté qu’il fut enlevé par ce dernier. On a dit encore qu’Adonis avoit été l’objet des complaiſances de Jupiter. On a été juſqu’à le faire un des favoris d’Hercule, & que la jalouſie porta Venus à indi-