Page:De Coster - La Légende d’Ulenspiegel, 1869.djvu/163

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Et Claes se lamentant diſait :

— Mort sur la roue, mon pauvre frère !

Et il ne pouvait se ravoir de sa grande douleur. Toutefois, comme il vit que l’homme avait soif & tendait son verre, il lui verſa du vin, mais il mangea & but sans plaiſir.

Soetkin & Nele furent abſentes pendant sept jours ; durant ce temps le meſſager de Joſſe habita sous le toit de Claes.

Toutes les nuits, ils entendaient Katheline hurlant dans la chaumine :

— Le feu, le feu ! Creuſez un trou : l’âme veut sortir !

Et Claes allait près d’elle, la calmait par douces paroles, puis rentrait en son logis.

Au bout de sept jours, l’homme partit & ne voulut recevoir de Claes que deux carolus pour se nourrir & s’héberger en chemin.


LXVIII


Nele & Soetkin étant revenues de Bruges, Claes dans sa cuiſine, aſſis par terre à la façon des tailleurs, mettait des boutons à un vieux haut-de-chauſſes. Nele était près de lui agaçant contre la cigogne Titus Bibulus Schnouffius qui, se lançant sur elle & se reculant tour à tour, piaillait de sa voix la plus claire. La cigogne, debout sur une patte, le regardant grave & penſive, rentrait son long cou dans les plumes de sa poitrine. Titus Bibulus Schnouffius, la voyant paiſible, piaillait plus terriblement. Mais soudain l’oiſeau, ennuyé de cette muſique, décocha son bec comme une flèche dans le dos du chien qui s’enfuit en criant :

— À l’aide !

Claes riait, Nele pareillement, & Soetkin ne ceſſait de regarder dans la rue, cherchant si elle ne verrait point venir Ulenſpiegel.

Soudain elle dit :

— Voici le prévôt & quatre sergents de juſtice. Ce n’eſt pas à nous, sans doute, qu’ils en veulent. Il y en a deux qui tournent autour de la chaumine.

Claes leva le nez de deſſus son ouvrage…