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DE LOCHEILL ET BLANCHE.

— Si tu les as, Biron, va-t’en trouver la Reine,
Va-t’en trouver la Reine, elle te les jouera,
Car des biens de ce monde longtemps tu ne jouiras.

Il n’eut pas joué deux coups, le Grand-Prévost qui entre
Le chapeau à la main faisant la révérence,
C’est en lui disant : Prince, vous plaît-il de venir
Ce soir à la Bastille, où vous faudra coucher.

— Si j’avais mon épée, aussi mon arme blanche,
Ah ! si j’avais mon sabre et mon poignard doré
Jamais Prévost de France ne m’aurait arrêté.

Il y fut bien un mois, peut-être six semaines,
Sans être visité de messieurs, ni de dames,
Hors trois gens de justice faisant les ignorants
Lui ont demandé : Beau prince, qui vous a mis céans ?

— Céans qui m’y ont mis ont pouvoir de m’y mettre :
C’est le Roi et la Reine, que j’ai longtemps servis,
Et pour ma récompense la mort il faut souffrir.

Se souvient-il le Roi des guerres savoyardes,
D’un coup d’arquebusade que je reçus sur mon corps ;
Et pour ma récompense il faut souffrir la mort !

Que pense-t-il le roi, qu’il faut donc que je meure,
Que du sang des Biron encore il en demeure :
J’ai encore un frère, le cadet d’après moi,
Qui en aura souvenance, quand il verra le roi.

Pour le coup de Locheill était complètement éveillé : la voix de stentor de José aurait réveillé la Belle-au-Bois-Dormant, plongée depuis un siècle dans le sommeil le plus profond : ce qui est pourtant un assez joli somme, même pour une princesse qu’on supposerait avoir ses franches coudées pour se passer cette fantaisie.

— Mais, dit José, vous monsieur, qui êtes presque aussi savant que le chevalier d’Haberville, vous pourriez peut-être me dire quelque chose de ce méchant roi